L'opposition prend le pouvoir à Madagascar
Andry Rajoelina a pris le contrôle sans violence et promet des élections.

Le Président Marc Ravalomanana
affirme lui être toujours à la tête du pays.



L'opposition malgache a pris le contrôle du siège du gouvernement à Antananarivo samedi et son chef Andry Rajoelina, qui a reçu le soutien de facto de l'armée,
a donné quatre heures au président Marc Ravalomanana pour quitter le pouvoir.
Dans un communiqué, la présidence a pour sa part affirmé que le pouvoir était toujours entre ses mains. Escorté d'une trentaine de militaires,
un cabinet de l'opposition nommé pour remplacer le gouvernement
s'est emparé de la primature désertée.
Le "Premier ministre" de cette "Haute autorité de transition",
Roindefo Zafitsimivalo Monja, entouré de ses "ministres",
a affirmé que "le président de la République, l'Assemblée nationale, le Sénat,
et le gouvernement (étaient) déchus de leur fonctions".
Cette instance "assure désormais les attributions dévolues au président de la République par la Constitution et le gouvernement de transition exerce immédiatement ses fonctions", a-t-il déclaré. «Passation démocratique» Peu après, Rajoelina, 34 ans, a demandé au président de quitter le pouvoir, lors d'un meeting de ses partisans dans la capitale où il est apparu sur la tribune entouré de militaires.
"Il n'y a pas d'autres solutions que la démission de Ravalomanana dans les quatre heures à venir", a-t-il lancé lors de sa première apparition publique depuis le 3 mars, devant 15.000 personnes réunies place du 13-Mai.

L'opposant, destitué début février de son poste de maire d'Antananarivo et caché depuis le 5 mars suite à une tentative d'arrestation, s'est dit "prêt à une passation démocratique" des pouvoirs et a affirmé qu'il n'enverrait "pas les forces armées" vers le palais présidentiel d'Iavoloha où se trouverait le chef de l'Etat. Cette semaine, l'armée, la gendarmerie et la police ont basculé dans la défiance au président, affirmant vouloir préserver l'unité et l'indépendance des forces armées de Madagascar, qui vit sa pire crise politique depuis l'arrivée au pouvoir en 2002 de Ravalomanana. L'armée soutient l'opposition Alors que la question d'un coup d'Etat rampant a pu se poser, le nouveau chef d'état-major de l'armée, le colonel André Andriarijaona, a déclaré samedi à l'AFP qu'il n'y avait pas lieu de déployer l'armée vers le palais présidentiel. "Je suis sûr que la garde présidentielle va quitter les lieux, donc ce n'est pas la peine de déployer les forces armées pour ça", a-t-il déclaré.

"Je suis sûr que la garde présidentielle ne va pas tirer sur les gens sinon la réplique sera catastrophique", a-t-il poursuivi, ajoutant: "Si ça peut ramener le calme, on soutient" l'opposition. La garde présidentielle est évaluée à environ 500 hommes, loin des quelque 28.000 hommes de l'armée, de la gendarmerie et de la police réunis. Au moins 28 personnes avaient été tuées le 7 février lorsque la garde présidentielle avait tiré sans sommation sur une foule de partisans de l'opposition.

Plus d'une centaine de personnes sont mortes depuis janvier.
Samedi, l'opposition a aussi reçu le soutien, symboliquement fort, du président de l'Assemblée nationale et ex-Premier ministre de Ravalomanana, Jacques Sylla. L'opposition a par ailleurs pris l'"engagement" d'organiser les élections présidentielle, législatives, communales d'ici 24 mois.

Elle accuse Ravalomanana d'avoir "manqué à ses obligations constitutionnelles et commis des actes rentrant en violation du serment prêté devant la Nation", lui reprochant notamment "la tuerie" du 7 février et "l'utilisation de prérogatives de puissance publique au profit d'intérêts purement privés et personnels". La Commission européenne s'est déclarée samedi "sérieusement préoccupée" par la crise.